mardi 5 novembre 2019

Article Journal L'Union républicaine 1876 - Décès Ernest de Soubeyran de Saint-Prix

Décès de Ernest de Soubeyran de Saint-Prix


LE RAPPEL – vendredi 22 septembre 1876
On lit dans l’Union républicaine de la Drôme :
Le parti démocratique vient de faire, dans la Drôme, une perte douloureuse dans la personne d’un de ses plus vaillants champions. M. Hector-Ernest-Humbert de Soubeyran de Saint-Prix est mort samedi dans son château de Saulce, à une heure du matin.
Issu d’une des plus vieilles familles du département de l’Ardèche, élevé dans un milieu où l’on a pour devise Dieu et le Roi, il semblait que M. de Saint-Prix dût être un jour l’un des soutiens du trône et de l’autel. Mais la nature l’avait doué d’un esprit trop libéral, d’une intelligence trop honnête, d’un cœur trop généreux, pour qu’arrivé à l’âge où l’on pense, il ne brisât pas les liens qui l’attachaient, et par sa naissance et par l’éducation qu’il avait reçue, au parti légitimiste.
Il fût donc républicain, non pas républicain platonique, mais républicain radical, militant.
En 1850, il tenta d’organiser dans la Drôme la résistance au coup d’Etat qu’il prévoyait déjà. Poursuivi sous l’accusation de complot, il réussit à s’évader et passa en Amérique. Le conseil de guerre de Lyon le condamna par contumace à la déportation dans une enceinte fortifiée.
Rentré en France à l’amnistie de 1859, il s’occupa d’exploiter sa magnifique propriété de Saulce, tout en continuant une propagande acharnée contre l’empire. Sa commune au plébiscite donnait une majorité de non.
Le 4 septembre 1870, il accourt à Valence, organise une imposante manifestation contre le gouvernement de Bonaparte et à deux heures, avant que la République ne fût proclamée à Paris, il entrait à la tête de la foule dans l’hôtel de la préfecture de Valence et faisait acclamer le régime pour lequel il combattait depuis vingt années.
Aux élections législatives du 8 février, les républicains le portèrent sur leur liste : il n’échoua qu’à quelques centaines de voix.
Au 24 mai, il lutta avec acharnement contre l’ordre moral et le parti clérical. Le 28 novembre 1874, il était poursuivi et condamné par le tribunal correctionnel de Valence à 8 jours de prison, pour outrage envers les membres d’un bureau électoral et le maire de l’ordre moral. Il avait fait 13 jours de prison préventive, fut mis au secret pendant durant tout le cours d’une longue instruction et amené à l’audience, les menottes aux mains, comme un criminel, à travers les rues de Valence où il a toujours rencontré une si grande et une si universelle sympathie.
Dès ce jour, M. de Saint-Prix fut touché au cœur, et sa santé alla chancelant de plus en plus. Il est décédé samedi.
Fidèle aux convictions de toute sa vie, M. de Saint-Prix est mort en libre-penseur.
Une foule considérable et que nous pouvons évaluer à près de quatre mille personnes, suivait le convoi funèbre de celui qui avait été si longtemps pour elle un ami.
Le deuil était conduit par les deux fils du défunt, M. Hector de Saint-Prix, maire à Saulce, et M. Camille de Saint-Prix, M. Bellin, juge-suppléant au tribunal de Lyon, beau-père de M. Camille de Saint-Prix. Les cordons du poële étaient tenus par M. Madier-Montjau, député de la Drôme, M. le docteur Chalamet, conseiller général, M. Blache, de Valence, ancien notaire, ami de la famille et M. Pierre Chastan, de Saulce.
Au cimetière, M. Madier-Montjau a dit adieu en termes élevés et émus à celui que la terre allait bientôt recouvrir.

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